— Publié le 15/06/2016

Cette mélodie qui vient de loin

Un documentaire de Miguel Moraes Cabral

À Vilarandelo, village reculé du nord du Portugal, une flûte se fait entendre au loin dans le paysage brumeux du matin. Une couturière joue avec une paire de ciseaux devant sa porte. La même musique résonne dans les ruelles du centre-ville de Porto. Un boucher attend devant son établissement, un couteau dans chacune de ses mains. Un homme muni d'une flûte de Pan apparaît au loin. Il joue et avance lentement au côté de sa moto. Il s'agit de Jorge, aiguiseur de couteaux, qui, depuis deux mois, n'était pas passé par là.

Ce film a bénéficié d'un soutien à la production de Ciclic-Région Centre-Val de Loire.

A noter : Le film diffusé pour le Mois du film documentaire est d'une durée de 63 minutes et non pas de 53 minutes (format TV ).

Mots clés : travail, tradition, modernité, mémoire, artisanat, portrait, Portugal

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Né en 1984, de nationalité belge et portugaise, Miguel Moraes Cabral est ingénieur du son et réalisateur. Il a commencé ses études à Nanterre en Arts du Spectacle pour continuer ensuite son apprentissage à l'École Supérieure de Théâtre et Cinéma de Lisbonne en son et réalisation. Il effectue également un échange universitaire avec l'école Louis Lumière à Paris où il se spécialise en son.

À la fin de ses études, il travaille sur plusieurs films en tant que monteur son : Ne Change Rien de Pedro Costa (Quinzaine des réalisateurs, Cannes 2009) Perdida Mente de Margarida Gil (meilleur scénario au New York International Independent Film Festival 2010), Bab Sebta de Pedro Pinho et Frederico Lobo (Prix Espérance au FID 2008, Marseille), Voix d'accès de Nathalie Mansoux (Meilleur Film, IndieLisboa 2008).

Actuellement, il est directeur technique et membre du comité de sélection de courts-métrages au Festival du Cinéma Indépendant de Lisbonne et travaille en tant qu'ingénieur du son.

A propos de son projet artistique développé à la Casa de Velázquez : "Je m'intéresse à la confrontation entre imagination et réalité, et aux déséquilibres qui en découlent. J'explore des situations vécues ou imaginées. Je les transpose afin de comprendre le monde qui m'entoure. Pour y parvenir, je crée un dialogue incessant entre l'image et le son par le biais du médium qui me passionne, le cinéma. Cette année, j'écris un film sur une équipe de tournage à la recherche de professions en voie de disparition. Ils suivent alors un étrange homme à dos d'âne qui transforme le voyage en odyssée dans le grand nord du Portugal."

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A propos de Cette mélodie qui vient de loin :
Le film prend place au Portugal, dans le nord du pays entre la région de Minho et Trás-Os-Montes, puis en Galice. Jorge Cunha, le personnage principal est aiguiseur de couteaux. S'il est originaire de Braga, une ville au nord de Porto, il parcours sans cesse la région en moto, passe de villes en villages.

Cette mélodie qui vient de loin est l'histoire de cet homme qui rencontre d'autres mondes, d'autres personnes à travers son métier. Le film est fait de déambulations dans des paysages très contrastés où Jorge est le témoin d'un temps, de traditions vouées à disparaître. Le documentaire chemine à travers les images et les sons, entre modernité et traditionLe film est construit sur le rythme des saisons et des voyages de Jorge.

"Le thème est essentiellement cinématographique et m'inspire par son mouvement constant, sa musique et son côté anachronique. Le son nous parvient toujours avant l'image : la flûte de Pan jouée par l'aiguiseur lui-même nous signale sa présence. Puis, nous découvrons ce "musicien" atypique qui parcourt de longues distances en semant autour de lui cette mélodie aux multiples variations." 

Jorge est de fait le personnage principal, et s'il s'agit d'un portrait, celui-ci se construit à travers lui et tout autour de lui : ses déplacements en moto, ses gestes de travail. Il est toujours en quête dans un environnement qui se dessine au fil des chemins qu'il emprunte. Les décors, se sont des routes, des rues, des villes et villages, des bâtiments, et aussi des espaces abandonnés. Et sa musique à lui, dans tout cela, "elle ne s'entend plus, elle n'est plus adaptée aux bruits des villes et il a peine à se faire remarquer".

Le film est un jeu de travellings en plans séquences, lorsque la caméra suit les déplacements de Jorge. Tantôt, il y a ces plans plus serrés lorsque la caméra fixe le regarde travailler, minutieux à l'ouvrage, tout près de lui. Le hors-champs est aussi très présent dans le documentaire.  "L'image et le son sont travaillés comme deux médiums, deux langages à part entière."

*Les passages entre guillemets sont extraits de la note d'intention.