— Publié le 07/07/2017

Atelier d'écriture critique

Plusieurs formules sont possibles autour de l’écriture critique. L’intervenant peut mener un atelier d’écriture de critiques, en prenant pour base de travail les films vus en salle. Il peut aussi définir les spécificités de l’écriture critique, rappeler son rôle dans l’histoire du cinéma et analyser avec les élèves certaines critiques existantes, notamment sur les films vus en salle.

Durée : variable. Au minimum 4 heures (pour un atelier d’écriture), idéalement une journée complète (pour un travail complet autour de la critique, atelier d’écriture inclus).

Intervenant : un(e) critique de cinéma

Proposition de déroulement : après une introduction sur la critique et le métier de journaliste, l’intervenant analyse avec les élèves quelques passages du film choisi et propose un mode d’organisation de la critique. Les élèves rédigent ensuite individuellement leur texte. En fonction du temps, une lecture des critiques peut être organisée en toute fin. Cet exercice peut également donner lieu à la publication d’une sélection des meilleurs textes rédigés sur la page Lycéens et apprentis au cinéma du site internet de Ciclic.

Essai d'ouverture de Luc Moullet

L'atelier d'écriture critique vu par Amélie Dubois, critique de cinéma aux Inrockuptibles.

"L'exercice a été profitable"

Au fil d'ateliers d'initiation à la critique menés dans des classes de lycées, j'ai pu mesurer et vérifier à chaque fois la nécessité de cet exercice et la profondeur de ses enjeux. Identifier, affirmer et exprimer son point de vue, ce n'est pas une mince affaire ! Retour sur les étapes importantes de cet apprentissage.

Première fois
Les ateliers d'initiation à la critique de cinéma se déroulent sur une journée durant laquelle les élèves se prêtent à un exercice de rédaction totalement nouveau pour eux. La plupart du temps, ils ne sont pas du tout familiarisés avec la critique, une phase de découverte s'impose donc à travers quelques textes mettant en évidence, par exemple, des avis divergents sur un même film. Outre, la mise en avant de différentes argumentations, ces lectures permettent de s'interroger sur le sens même de l'exercice : A quoi sert la lecture de critiques ? Pourquoi en écrire ?

Des émotions et des mots
Se met en place, dans un premier temps, un travail précieux de description, d'appropriation et de réflexion autour du film étudié. Travail sur la perception et le langage qui passe par le dialogue, le débat et une invitation à rentrer dans la logique même du film. L'idée motrice du projet est d'apprendre à raccorder des impressions, des émotions, des points de vue à une mise en scène. Pour cela, un passage par une initiation à l'analyse filmique s'impose, qui permet aux élèves de mesurer les choix, les partis pris d'un ou une cinéaste.

L'art de se poser des questions
Rentrer dans la logique d'un film, c'est avant toute chose apprendre à se poser des questions avec et à partir du film, c'est le b.a.-ba de la critique. Par exemple : Pourquoi dans Soyez sympas rembobinez, Gondry ne montre-t-il pas les films suédés et préfère-t-il montrer leur fabrication ? Pourquoi dans La Cérémonie, Chabrol ne veut pas rendre les personnages des bourgeois totalement antipathiques ? Que les élèves n'aient pas peur d'inclure des interrogations dans leurs textes, au contraire, ils sont vivement encouragés à le faire : mieux vaut se poser les bonnes questions, sans forcément avoir de réponse, que de vouloir faire absolument autorité. Les éléments sur lesquels les élèves butent servent bien souvent de tremplin pour comprendre les choix qui ont été faits par un cinéaste. Cela permet aussi de s'interroger sur la place qu'un film laisse au spectateur.

Matière vivante
Autre point important : appréhender le cinéma comme une matière vivante et non un objet d'étude figé. En quoi un film peut-il parler aux élèves, les concerner directement ? Qu'est-ce qui peut faire le lien entre le film et eux, entre le film et notre époque ? Car c'est évidemment le rapport des élèves au film qu'il s'agit de creuser, d'approfondir – c'est le point de départ de tout, et il n'est aucunement question ici de partir d'une idée ''officielle'', unique sur le film. Tout avis est recevable à partir du moment où il est argumenté. Les élèves sont évidemment invités à se servir de leurs références littéraires, musicales, picturales, cinématographiques, télévisuelles et autres pour étoffer leurs textes.

Du plaisir
Si le film est une matière vivante, le texte écrit doit lui aussi être conçu tel quel. Il n'est pas inutile d'insister sur la notion de plaisir dans l'écriture. Le plaisir est un important moteur dans l'écriture : il n'est pas du tout question ici de faire une rédaction et de suivre un schéma scolaire, mais au contraire de s'amuser avec les mots et les idées, de laisser libre cours à une certaine fantaisie, à une certaine poésie qui permet bien souvent à un élève de personnaliser et d'affiner son point de vue.

Au-delà du cinéma
Partager un regard, une émotion. Faire passer une analyse, une idée. Retranscrire en mots les forces et les faiblesses d'une mise en scène. Exprimer des nuances. Cet atelier soulève de nombreux enjeux qui dépassent le cinéma et qui touchent plus largement à la maîtrise du langage. Il est question aussi d'effectuer un travail littéraire qui amène les élèves à choisir le mot juste qui leur permettra de soutenir leur point de vue le mieux possible. Le sens de l'analyse et le choix du mot juste leur serviront dans la vie courante pour défendre de la manière la plus convaincante une idée et faire entendre leur voix. Par ailleurs, au cœur de cet atelier est défendue l'importance de développer une certaine distance analytique et critique pour pouvoir tout simplement "faire le tri" parmi les nombreuses images qui nous entourent.

Amélie Dubois, février 2014