Jamais comme la première fois ! - Technique

Entre réel et animation

Pour Jamais comme la première fois !, Jonas Odell a utilisé plusieurs techniques et les a mixées : dessin traditionnel, images réelles, papier découpé, rotoscopie, multi-plan. Toutes ces techniques sont liées en 3D grâce au compositing (méthode numérique qui permet de mêler différentes sources d’images). Jonas Odell et son équipe ont utilisé des logiciels permettant de recréer les différents effets qu’il souhaitait rendre. Ainsi, les marionnettes en papier découpées, par exemple, n’ont pas été animées à la main, les photos ont été texturées, le multi-plan réalisé virtuellement grâce à l’ordinateur.

Il est difficile d’établir un historique précis du mélange de techniques, car, si l’on peut faire une chronologie et un récapitulatif technique par technique, en dresser les principes, le mélange des techniques est tentaculaire.

Le mélange de techniques tel que le propose Jonas Odell relève souvent plus de l’expérimentation, et chaque réalisateur est libre de les conjuguer différemment, d’utiliser l’informatique ou de choisir de les exécuter de manière traditionnelle. C’est pour cela qu’on retrouve ce genre de mélanges principalement dans le court métrage d’auteur et dans le clip vidéo, qui sont des formats courts et permettant une certaine liberté, une certaine créativité. En long métrage, c’est principalement le mélange entre images réelles et images de synthèse qui est utilisé.

Le mélange des techniques est apparu très tôt dans l’histoire du cinéma. En 1908, dans Fantasmagorie d’Émile Cohl, que l’on considère comme le premier dessin animé de l’histoire, la main en images réelles du dessinateur apparaît dans le cadre et dessine le personnage, ce qui sera repris bien plus tard, dans les années 1970 par Osvaldo Cavandoli pour La linea. C’est le film Tron de Steven Lisberger, sorti en 1982, qui, le premier, intègre des personnages réels dans un décor en images de synthèses (et non en dessin traditionnel). Cette fois, les personnages dans leur entier évoluent dans le décor, et sont les personnages principaux de l’histoire. Il ne s’agit plus de clins d’œil ou de gag, mais du fondement même du film, puisque les personnages humains sont censés être prisonniers d’un jeu vidéo.

Plus courant, l’apparition d’un personnage animé au sein d’un univers en images réelles a été inventée par les frères Fleischer (inventeurs également de la rotoscopie) dans les années 1920, et démocratisé par Walt Disney avec Mary Poppins, Elliot le Dragon ou Roger Rabbit. Cette technique permet aujourd’hui un rendu hyper réaliste, à l’image des dinosaures dans Jurassic Park par exemple, ou l’ajout de personnages extra-terrestres mais au rendu réaliste, comme dans Star Wars, mais est encore aujourd’hui utilisée à des fin comiques, comme dans la série Minuscule, de Thomas Szabo et Hélène Giraud, où l’on suit la vie d’insectes en images de synthèses dans des décors réels.

L’un des meilleurs représentant du mélange de techniques d’animation proprement dit dans le court métrage d’auteur est le réalisateur belge Raoul Servais, dont certains films, comme La Fausse Note par exemple (1966), rappelle tout à fait certains choix de Jonas Odell dans Jamais comme la première fois !, avec des décors plats faits de collage de photos, d’extraits de journaux ou de billets de banque alors que les personnages sont en en dessin animé traditionnel. Il utilise également beaucoup de personnages en images réelles dans des décors artificiels, ce qui accentue l’effet d’inquiétante étrangeté de ses films.

Cécile Giraud-Babouche, 2011